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MAR : Larbi Ben Barek était trop populaire pour le Royaume

AB. LAHOUARI

Les supporters de l’Espérance de Mostaganem ont pris «d’assaut» la commune de Kouba, tard dans la nuit du jeudi à vendredi, réveillant à coups de klaxon de voitures et de tambourins les habitants du quartier de Ben Omar et des cités d’El Bahia et de Nobleterre. Ils ont créé ainsi un vacarme assourdissant. Cependant, une petite pause a eu lieu dès les premières de l’aube. Située en face du stade Mohamed-Benhadad, qui devait abriter le match RS Kouba -ES Mostaganem (0-0), la mosquée du même nom, Mohamed Benhadad, affichait complet lors de la prière du Fadjr et du Sobh. Des centaines de jeunes supporters mostaganémois y ont fait leurs ablutions et leurs prières. Puis, en une longue file disciplinée, ils ont attendu, en chantant à la gloire de leur club, l’ouverture du seul guichet du stade pour se procurer les billets d’entrée. Durant la rencontre, ils ont été d’une très grande sportivité.

Lors de la saison 1955 -1956, la Perle noire, le Marocain Larbi Ben Barek ( à droite de notre photo en compagnie de la légende algérienne, Mustapha Zitouni lors du match France – Afrique du Nord de 1954), avait signé à l’USM Bel Abbès. A la grande surprise, notamment des clubs Pieds noirs, il avait écourté sa carrière professionnelle, alors qu’il évoluait encore à l’Olympique Marseille. Plus encore, il était encore sélectionnable en équipe de France et plusieurs clubs européens le sollicitaient. La quarantaine passée, il avait choisi de s’installer au bord de la Mekerra. L’ex-arbitre international, Belaïd Lacarne, natif de la ville, a raconté à l’auteur de ses lignes le choix de l’international français (le Maroc étant sous protectorat) : «Durant l’intersaison, trois dirigeants s’étaient rendus à Marseille pour le convaincre de porter les couleurs Vert et Rouge et ils y sont parvenus comme par miracle».

Homme pieux, connu pour ses valeurs humaines et sa très grande tolérance, Larbi Ben Barek a été séduit par le challenge proposé par les dirigeants où figuraient l’éducation de la jeunesse musulmane et la rivalité entre l’USMBA et le Sporting (SCBA) qui bénéficiait de l’apport des légionnaires allemands et autrichiens. Alors que le coup d’envoi de la saison approchait à grands pas et que les dirigeants perdaient, au fil des jours, l’espoir de le voir à Sidi Bel Abbès, un coup de téléphone annonçait son arrivée. L’USMBA organisait une grande «oueda», et on vit pour la première fois les entraî- nements se dérouler devant un nombreux public composé de supporters du club. Ceux du Sporting s’y associaient également pour ne pas rater les prouesses techniques du légendaire magicien de la balle ronde. Tout un spectacle.

Comme par enchantement, le stade accueillait de plus en plus de jeunes qui ne fréquentaient plus les lieux malsains. Et l’administration coloniale n’avait de cesse de multiplier les provocations, autour des lieux de culte et du stade pour les empêcher de les fréquenter. Durant le championnat 1955 – 1956, l’USMBA traitait d’égal à égal avec son grand rival, sous la direction de Larbi Ben Barek, comme entraîneur – joueur. Elle parvient à se qua- lifier pour la finale de la Coupe d’Afrique du Nord contre le Sporting qui n’a pas eu lieu. Larbi Ben Barek, le meilleur joueur marocain de tous les temps, retournait alors dans son pays natal devenu indé- pendant où il connut l’ingratitude. Au jour d’aujourd’hui, pas un seul grand stade ne porte son nom. Il était trop populaire et refusait l’injustice…
– AB. LAHOUARI

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